La mémoire du Codesign

La documentation dans un processus de codesign : simple exigence méthodologique ou « force insoupçonnée » ?

 

Dans tous les processus, qu’il s’agisse de créativité et/ou de conception et/ou de développement, la documentation est au mieux vécue comme une ascèse dictée par la nécessité et au pire perçue comme une souffrance imposée. Vue comme une contrainte, une perte de temps, un acte purement procédural et administratif, elle est souvent négligée et/ou réalisée rapidement, en fin de processus, dans un mode très dégradé.

Lorsqu’on interroge les acteurs d’un projet, une myriade de bonnes raisons fusent immédiatement pour minorer l’importante de la documentation :

  • « Je n’ai pas le temps ; je préfère passer ce temps sur d’autres activités plus importantes du projet»,
  • « Je le ferai mais plus tard une fois achevées toutes les activités du projet, pas tout de suite…»
  • « Nous sommes concentrés sur la livraison du projet. La documentation peut attendre encore un peu…»,
  • « Nous n’avons pas beaucoup de temps ni de budget ; le temps c’est de l’argent ; je peux réaliser un projet de plus si on laisse tomber la documentation…»,

Or, dans une approche de codesign, la documentation est une activité à part entière tout à fait clef de bout en bout dont les enjeux méritent d’être rappelés. Elle permet en effet de processer la démarche, d’obtenir du feedback collaboratif améliorant la robustesse et le « time to market », de relayer et d’essaimer mieux et plus largement pour accroître la diffusion épidémiologique de la démarche.

La documentation permet une diffusion au plus grand nombre, nourrissant ainsi l’intelligence collective via notamment une donnée numérique, indexée, archivée, navigable et peu chère. Le Web est un outil de dissémination, une machine à relayer la traçabilité des contributions (et celle des contributeurs dans un contexte de propriété intellectuelle partagée) grâce à la formidable mémoire de stockage de l’Internet.

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La documentation devra être conçue et, disons-le, marketée dès la phase amont du projet pour devenir un levier d’action majeur.

La documentation peut prendre des formats différents. Au-delà de sa forme classique – document rédigé, diffusé ou publié – elle peut revêtir des formats plus originaux. Les évènements, jalonnant de plus en plus régulièrement les processus de codesign, font ainsi partie intégrante de la documentation, permettant communication, diffusion et accélération du processus.

Au-delà de ces bénéfices, la documentation donne encore plus de force et de sens au processus quand elle se fait en open source. En effet, de par son engagement, le designer contribue à alimenter le domaine public, et dans certains cas à enrichir les communs[1].

En procédant ainsi, le codesigner répond à la finalité première des interventions menées en mode collaboratif, à savoir les rendre plus durables.

Dans tous les cas, la documentation doit faire l’objet d’un processus en soi, intégré et naturel, animé par une intention stratégique, exécuté de manière rigoureuse et rythmée, pour nourrir, renforcer et pérenniser le format collaboratif.

 

Merci à Sophie Pène et Sébastien Rocq pour leurs retours d’expérience et réflexions – le 9 octobre 2015 @GreenHouse Deloitte

[1] Ce qui nous rassemble, ce dont nous prenons soin tous ensemble

Restitution proposée par le participant du Diplôme Universitaire Codesign : Matthieu Saint-Raymond

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2 thoughts on “La mémoire du Codesign

  • La notion de communs me fait penser à l’article de Charlotte Hess recommandé par Sophie Pène lors de notre journée du 9 octobre : « Inscrire les communs de la connaissance dans les priorités de recherche ».
    http://vecam.org/archives/article1307.html

    Cet article est une voie d’entrée pour aborder les nombreuses publications, dans le monde anglo-saxon, sur le sujet des communs, et pour documenter l’émergence du concept de biens communs de la connaissance. Une très importante bibliographie nous a été fournie par Charlotte Hess, qui a créé et longtemps dirigé la Bibliothèque numérique des communs.

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